Un nouveau métier peu connu en Suisse consiste à tester la facilité d’utilisation des outils numériques. Présentations avec Dorit Horst et Julien Roland, coworkers @ Muse Lausanne.
Par Caroline Rieder, 24heures
Un internaute met en moyenne cinq secondes à se faire une idée du site qu’il visite. La première impression se révèle aussi rapide que déterminante. Car, sur la Toile, il suffit d’un clic pour filer voir si l’herbe est plus verte ailleurs. Or, avec l’essor technologique, les sites sont devenus plus élaborés, mais pas toujours plus faciles d’utilisation.
En moins de temps qu’il n’en faut pour dire «ouf», l’œil scanne la page à la recherche des mots-clés, de l’information ou du service requis. Les concepteurs n’ont donc pas droit à l’erreur. Encore trop souvent pourtant, le service souhaité ne se trouve pas là où l’utilisateur le cherche spontanément. Un site peut être beau, son contenu ludique, «il doit avant tout être facile à utiliser», soulignent Dorit Horst et Julien Roland, fondateur d’Uservalue.
Ils apportent, avec leur société basée à Lausanne, une expertise en ergonomie numérique. Elle est coach et psychologue, lui ingénieur. Tous deux ont suivi une formation spécifique à l’étranger. Après avoir notamment affûté leur œil chez Renault, pour optimiser les habitacles des voitures, le couple a lancé sa société. Parmi leurs clients figure la RTS, dont ils ont repensé l’espace réservé aux archives.
S’assurer de la facilité d’utilisation d’un outil numérique est pour l’instant peu courant en Suisse. «Il y a ici de nombreuses innovations, mais peu de start-up ont testé leur site ou leurs applications», remarque Julien Roland. Cerner les attentes ne va pourtant pas de soi. «Parfois, des fonctionnalités sont ajoutées juste parce que la technologie le permet, mais ça n’apporte pas grand-chose. Le site d’une grande entreprise reflète aussi parfois davantage son organisation interne qu’une présentation logique pour le visiteur», relève le duo.
Un site pour toutes les tailles d’écran
Les experts conseillent en outre d’opter pour un site qui doit s’adapter à toutes les tailles d’écran pour permettre de jongler entre ordinateur, tablette et smartphone. Cerise sur le gâteau: les contenus numériques sont priés de générer de l’émotion. «On doit avoir envie de revenir, de réutiliser l’interface», souligne Dorit Horst. Des «badges», comme le statut «expert» gagné au fil de commentaires incite ainsi à retourner donner son avis. De même, l’indication du taux de remplissage d’un profil suscite l’envie quasi irrépressible de compléter les informations. «Mais en abuser peut lasser», prévient la spécialiste.
Évaluer une interface se fait cependant avant tout avec ses utilisateurs. «Nous proposons des tests avec 8 ou 16 personnes représentatives de la clientèle cible de l’entreprise.» Ces cobayes doivent effectuer des tâches bien définies, comme des recherches très précises sur le site. Contrairement aux sondages, il n’y a pas besoin de multiplier les participants. «Avec seulement 8 personnes, on va découvrir 80% des problèmes que vont rencontrer les utilisateurs», précise Julien Roland.
Le duo complète son diagnostic avec l’«eye tracker». L’outil enregistre et retrace le trajet des yeux sur la page. Il permet de dégager des points chauds, très vus, et d’autres, froids, qui retiennent peu l’attention. «Or parfois c’est à cet endroit que figure un service important, comme la newsletter», relève Julien. Les clients, qui peuvent assister au test derrière une vitre sans tain, sont parfois très surpris…
Les pièges à éviter
Barre de menu à rallonge Sans être trop grande, elle doit rendre visible les fonctionnalités les plus utilisées.Formulaires trop longs Il faut les réduire aux champs obligatoires, sinon l’utilisateur risque d’abandonner en route.Langage peu clair Etre précis et éviter le jargon, pour que l’internaute puisse identifier tout de suite ce que le site offre.Navigation trop complexe Elle doit aider à la fois ceux qui cherchent une information précise et les autres.Recherche peu performante Souvent les entreprises pensent qu’il suffit de s’appuyer sur le moteur de recherche de Google, mais ça ne suffit pas, car tout n’y est pas indexé.