Des femmes qui réinventent leur job

Viviane Lowe au travail à l’espace de coworking La Muse à Genève. © Francesca Palazzi

Viviane Lowe au travail à l’espace de coworking La Muse à Genève. © Francesca Palazzi

Viviane Lowe, traductrice et coworkeuse @ Muse Genève, à l’honneur dans le Femina du 17 août dernier. Extrait de l’article de Emmanuel Grandjean, à retrouver dans son intégralité ici

Un espace, 1000 métiers

A moins d’être son propre patron… Monter votre boîte, vous en rêvez. Seulement voilà, il y a parfois loin de la coupe aux lèvres. Certains ont quand même tenté le pari. A La Muse, à Genève, ils sont une quarantaine réunis dans un même espace. On les appelle les coworkers. Le concept est né en 2006 à San Francisco, ville la plus communautarisée des Etats-Unis. L’idée? Créer un réseau de travailleurs qui n’exercent pas le même métier mais bossent au même endroit. A Genève, deux de ces coworkspaces existent déjà et un troisième prévoit d’ouvrir en septembre.

Dans les faits, le coworking s’adresse à ceux qui démarrent leur entreprise mais n’ont pas les moyens de payer plein pot le loyer d’un bureau. Ici, ils peuvent réserver une place de travail qui comprend une connexion wi-fi, une salle de réunions et un accès illimité à la machine à café, selon un forfait calculé en fonction de leur taux d’occupation. Surtout, il recrée le lien social qui leur manque à la maison. «Cette année, nous avons franchi un palier. Nous sommes quarante-cinq à Genève et trente-cinq à Lausanne», explique Claire Gadroit, qui gère La Muse, tout premier espace de coworking à s’être implanté dans le canton, il y a cinq ans.

Nouveaux collègues

Car le coworking cartonne. Au pique-nique organisé tous les lundis entre midi et 14 h, une dizaine de participants partagent leurs expériences. Assis dans le canapé du coin détente, Charles Grossrieder raconte son projet «easy2family», site internet qui épaule les couples divorcés dans l’organisation compliquée de leur nouvelle vie de famille, recomposée ou pas. «Calendrier, partage de photos et de vidéos, informations personnelles sur les enfants, tout y est consultable de manière totalement sécurisée par les parents», explique cet ancien employé de banque remercié par sa boîte et devenu son propre patron. «J’ai commencé chez moi, mais ça n’allait pas. Il fallait résister à la tentation du frigo et à la musique en bruit de fond. Il y avait la solitude, surtout, qui devenait oppressante. Le coworking, c’est donc une vie de bureau en simili où vos collègues exercent un autre métier que le vôtre.

A La Muse il y a un exportateur de crevettes, un joaillier, un créateur de figurines, des développeurs de jeux vidéo ou encore une céramiste qui gère un atelier d’expression créatrice pour personnes en mauvaise santé. «Il ne s’agit pas de partage du travail. Ni de simplement venir s’installer à bon marché. Ceux qui viennent ici dans ce but ont tout faux», insiste Geneviève Morand, fondatrice de cette ruche communautaire. «C’est avant tout partager des compétences, élargir son réseau.» Car vivre ainsi ensemble augmente forcément les rencontres, donc le «Bump rate» des résidents. Bump rate? Traduisez «facteur de collision». Autrement dit: la chance de tomber sur la personne qui fera rebondir votre projet. Et ça marche. La preuve: Charles Grossrieder cherchait à rendre son site accessible en langues étrangères; il a demandé à Viviane, sa voisine de table, de l’aider à l’adapter en anglais. «La présence d’une autre traductrice et d’une interprète crée ici une sorte de minicommunauté professionnelle; nous nous consultons sur des difficultés de traduction, nous partageons des contacts», explique cette traductrice, rédactrice et correctrice bilingue français-anglais qui turbine à La Muse depuis un peu plus d’un an.

«Les gens restent entre trois mois et deux ans. Les derniers partants ont ouvert leur propre bureau. Ils étaient arrivés à trois, ils nous ont quittés à dix», reprend Geneviève Morand. Et qu’est-ce qui fait un bon coworker? La présidente de la fondation La Muse pour la créativité entrepreneuriale dresse son portrait type: «Il doit avoir le goût du partage et celui de l’ouverture. Il doit aussi savoir donner sans rien attendre en retour. Il constatera assez vite qu’il récoltera bien davantage que ce qu’il escomptait.»

Car tous les coworkspaces ne se ressemblent pas. «Il y a ceux qui sont plus orientés médias sociaux ou high-tech», analyse Geneviève Morand, qui prépare un livre sur ces communautés aux styles dispersés. Et le genre de La Muse, ce serait plutôt?… «Nous sommes ouverts à toutes les propositions. Il faut juste que le coworker qui s’inscrit chez nous porte un projet qui tienne la route.»

Elle travaille en «coworking»

Viviane Lowe, traductrice, Genève «J’ai pas mal vécu à l’étranger, au gré des déplacements de mon mari. Lorsque nous sommes finalement revenus vivre en Suisse, je me suis mise à la recherche d’un espace de coworking comme j’en avais connu à Hongkong et Tokyo. J’habite à la campagne. Etre sur place, au centre-ville, c’est pratique pour fixer des rendez-vous. Le reste du temps, tout dépend du volume de travail. Dans les périodes où j’ai besoin de passer six heures très concentrée, je suis quand même plus efficace à la maison.»

Les mots du boulot

Bonnes adresses et petit glossaire pour réinventer son temps de travail.

Le jobsharing La solution idéale pour les postes à responsabilités qui ne souffrent pas du temps partiel. Un jobsharing, c’est un travail à 100% partagé entre deux mi-temps.

Le coworking Idéal pour les indépendants qui ne souhaitent ni travailler en permanence seuls à la maison ni payer plein pot un loyer de bureau. Pour un forfait proportionnel au taux d’occupation, on dispose d’une place de travail avec connexion wi-fi, salle de réunions, accès illimité à la machine à café… et création du réseau social indispensable à toute activité.

Télétravail Littéralement «travail à distance», soit: bosser chez soi comme on le ferait au bureau. Plus de bavardages entre collègues, plus de réunions qui s’éternisent, enfin la vraie vie pour avancer sur ses dossiers! Une prise de distance avec son biotope professionnel qui s’avère très productive. A condition d’être mesurée: pas plus de deux jours hebdomadaires, sous peine d’engendrer une rupture du contact avec le groupe.

Laisser un commentaire

Your email address will not be published. Required fields are marked *